Youtopia en quelques mots
Année de création | 2009 (14 ans) |
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Nombre d’habitant.es | 20 dont 2 enfants à mi-temps (2 et 11 ans) |
Espaces mutualisés | Cuisine/salon de 80m2 – Petite cour – salle polyvalente en sous-sol de 50m2 et des espaces de rangement – un atelier bricolage – salle de bain/WC à chaque étage – buanderie (lave-linge et sèche linge professionnels) |
Services mutualisés | Nourriture achetée en commun pour 10$/ jour pour les adultes, 5$ pour les enfants |
Pour en savoir plus | https://www.ic.org/directory/youtopia/ |
Notre voyage familial a commencé à New York pour notre unique semaine de visite touristique en milieu urbain (ouf !). Nous avons eu la chance d’être accueilli par la communauté Youtopia en plein cœur de la mégalopole, dans le quartier de Brooklyn.
Il s’agit en fait d’une très grande colocation : Alan, 46 ans, le propriétaire de l’immeuble de 3 étages (5 niveaux), a acquis ce bien il y a 14 ans avec un investissement personnel faible et un emprunt sur 30 ans (son coût était d’environ 650 k$ alors). Aujourd’hui le bien a été presque totalement rénové (des chambres sont encore en cours) et sa valeur avoisine les 3 millions de dollars : Brooklyn est la nouvelle place to be.
Tous les autres résidents sont locataires. Les loyers vont de 700 à 1400$ pour des chambres de 15 / 20 m2 avec ou sans fenêtre. Un prix qui semble important, mais qui est bien en dessous du marché local.



Des habitants décomplexés
Les habitants sont majoritairement des artistes : un Français venu tenter sa carrière à Broadway, un marionnettiste, une trapéziste de boite de nuit… Il semble que la plupart font des petits boulots alimentaires ou passionnels pour gagner leur vie : organisateur de marché d’artisanat, homme à tout faire, prof de yoga dans les parcs, organisatrice de cérémonies chamaniques, etc.
Ce qui distingue le plus cette petite communauté est son ouverture au mouvement “Sexualité Positive” (SexPo ou Sex+ pour les intimes). Concrètement cela se manifeste par une grande décontraction à la nudité / aux seins nus, par de nombreux hugs entre résidents, une forte tendance au polyamour et une décoration originale avec beaucoup de miroirs et des lumières kitch. Alan et sa compagne Rachel sont d’ailleurs organisateurs de soirées SexPo / tantra dans la salle commune de Youtopia ou dans d’autres communautés US. Nous n’avons malheureusement pas pu assister à l’une de ces soirées…
L’organisation du quotidien et la gouvernance
Depuis maintenant 2 ans les résidents partagent leur nourriture. En tout cas ils partagent la corvée des courses, car pour ce qui concerne les repas, c’est un peu n’importe quand et chacun pour soi. Le seul repas commun auquel nous avons assisté était le “pot luck” du jeudi soir où chacun apporte un truc à partager. Les “repas familiaux”, où un résident cuisine pour tout le monde, ont lieu parfois à l’initiative d’un habitant, mais plutôt rares en ce moment.
Sous des airs de communauté anarchiste, le groupe est en fait très organisé : des commissions sont menées par des groupes de personnes pour gérer les tâches indispensables comme les finances, les achats alimentaires, la planification des travaux, ou améliorer les relations humaines. Sur ce point le groupe explore de nombreuses techniques : réunions de feedback, cercle du cœur pour prendre soin les uns des autres, espace d’apaisement, organisation de soirées, recherche et accueil de nouveaux, etc…
L’investissement des habitants est assez inégal, à la fois lors des réunions (seulement 2 à 5 personnes lors des cercles du cœur pour 20 habitants), mais aussi dans la gestion du quotidien. Chacun est invité à réaliser 2h par semaine de travail pour la communauté mais clairement certains (dont Alan, le propriétaire) dépassent largement leur quota.

Rapport d’étonnement
Dès notre arrivée nous sommes surpris par le différentiel de conscience écologique entre les valeurs et les actes. Les lumières restent allumées jour et nuit, au point que pour nous accueillir au sous-sol il nous est impossible d’éteindre certaines ampoules que nous devons dévisser !!! Les habitants aiment prendre des bains dans des baignoires gigantesques et préfèrent le sèche-linge à l’étendage dans la cour (alors que le temps le permet !). Et la climatisation tourne en continu, parfois même quand la température extérieure permettrait un bon courant d’air…
Les habitants sont choisis non-fumeurs (de cigarettes), mais la marijuana (qui est légale aux US et en vente libre partout dans les rues), les champignons ou d’autres drogues assez légères (certaines légales), sont parfois consommés par les habitants, seuls dans leurs chambres ou en groupe lors de soirées spéciales.
L’alcool est très faiblement consommée, même lors du repas partagé du jeudi. Cela va dans une mouvance de prendre soin de son alimentation : la plupart de la nourriture est végétarienne, parfois sans gluten sans laitage.
Le propriétaire Alan vit en ce moment dans une sorte de placard dans lequel il dort (lit en hauteur) et il travaille (bureau coincé sous le lit). Il prévoit cependant d’acquérir bientôt un étage entier avec sa compagne et sa fille, quand les travaux auront avancés. Cet homme est très investi dans la communauté, au service du collectif. Pour autant le modèle économique basé sur une propriété individuelle fait qu’il est le seul à s’enrichir. Un montage assez antinomique avec ses idées, qu’il regrette et espère pouvoir changer en partageant la propriété avec des familles qui feraient l’acquisition d’étages entiers par exemple. Il semblerait que les montages juridiques new yorkais ne facilitent pas l’acquisition d’un bien à plusieurs personnes.
Pour conclure, j’ai l’impression d’avoir survolé cette communauté atypique. Il me semblait cependant intéressant de vous en partager ma vision, même partielle. J’ai beaucoup aimé rencontrer ces habitants, bien différents de l’étasunien moyen, entre deux visites de cette folle cité.
Pour suivre nos aventures familiales, voici notre blog de voyage
A bientôt !


